Monsieur le Premier Ministre

Est-ce que vos propositions vont permettre aux Français de vivre mieux ? Est-ce que les ouvriers, les infirmières, les retraités, les demandeurs d’emploi, les étudiants, vont enfin pouvoir vivre dignement ?

 


Non Monsieur le Premier Ministre.

Vos annonces ne sont pas à la hauteur des attentes, car ce que vous demandent les Français, en métropole comme dans les territoires d’outre mer accablés par la vie chère, ce n’est pas l’aumône, ce ne sont pas des miettes, c’est tout simplement d’être respectés. C’est d’avoir un travail et de pouvoir en vivre dignement, c’est de pouvoir élever correctement leurs enfants, avoir accès aux loisirs, au sport, à la culture.

Ce qu’ils vous demandent, c’est d’avoir des services publics qui ne se réduisent pas à internet, qui répondent présents dans les villes comme à la campagne. C’est d’avoir des communes et des collectivités qui aient les moyens de répondre à leurs besoins.

Et il n’y a rien de tout cela dans vos propositions.

Et, oui, les Français se sentent méprisés.

Et cela fait des années que ça dure !

30 ans de politique de réduction de la dépense publique au nom d’une dette dont ils ne sont pas responsables;

30 ans de mise en concurrence des travailleurs français avec ceux des pays à bas coûts;

30 ans de libéralisation totale de l’économie au nom de Traités européens, avec des inégalités qui n’ont jamais été aussi grandes;

30 ans de services publics privatisés, parfois vendus à des capitaux étrangers.

30 ans de libéralisme et vous en voulez toujours plus !

Car c’est vous qui êtes aujourd’hui en responsabilité, c’est vous qui avez été élus.

Et cela fait même des mois que nous dénonçons, avec d’autres, le Président des Riches et vos choix politiques en faveur du capital, de la finance.

Et aujourd’hui, la colère qui monte, c’est celle des Français, dans leur diversité, de l’ouvrier à l’agriculteur, du retraité à l’étudiant en passant par les pompiers et les routiers, qu’ils aient des gilets jaunes, des blouses blanches, des cols bleus ou des robes noires, c’est une révolte arc en ciel, une révolte pour la dignité.

Ne les humiliez pas en refusant de répondre à leurs demandes urgentes. Car il n’est plus tolérable que les salariés, et même ceux qui ont un temps plein, n’arrivent pas à boucler leur budget parce que le SMIC est trop bas. Il n’est pas acceptable, dans un pays riche comme le nôtre, qu’une personne handicapée survive avec une pension d’invalidité inférieure au seuil de pauvreté. Il est insupportable que nos retraités voient leur pension baisser parce que vous avez augmenté la CSG.

Et pendant ce temps-là, les revenus des 0,1% les plus riches de France augmentent de 86 000 euros en moyenne par an. Vous ne voyez pas le caractère explosif de telles inégalités !

Voilà pourquoi nous demandons une hausse de 200 euros net par mois du SMIC en commençant dès ce 1er janvier.  Et parallèlement à cela nous vous demandons d’ouvrir des négociations avec les partenaires sociaux pour une augmentation générale des salaires, dans le privé comme dans le public.

Vous allez peut-être nous répondre que tout cela coûte trop cher. Mais ce sont vos choix qui coûtent chers !

Ce n’est certainement pas le travail qui coûte cher, ce sont les cadeaux que vous avez faits aux plus riches, au capital, à la finance !!

Suppression de l’ISF, de la taxe sur les dividendes, mais aussi cadeaux à gogo avec la Flat tax, la niche Copé, l’Exit tax…

Ce sont 8 à 10 milliards d’euros que vous donnez cette année aux riches, aux spéculateurs et que vous proposez de maintenir en 2019 !

Sans parler du CICE, alors là c’est le pompom : double ration en 2019, 40 MILLIARDS d’aides publiques versées indistinctement à toutes les entreprises, les plus riches comme les plus en difficulté !

C’est pour ça que cela ne va plus.

Il est quand même inadmissible de verser des aides publiques à des multinationales qui n’en n’ont pas besoin, à des grands groupes bancaires, des compagnies d’assurances, des Mc Do, des Starbucks et autres Amazon qui ne payent pas, eux, leurs impôts comme tout le monde ! C’est pourquoi nous vous proposons de réserver les aides publiques aux entreprises qui en ont besoin, à celles qui s’engagent à augmenter les salaires, à faire de la formation ou qui investissent dans la transition écologique.

Parlons des impôts. Les Français ne sont pas contre l’impôt, ils sont pour un impôt juste, payé par tous, progressif, calculé en fonction de ses moyens. Parce que l’impôt, c’est le prix à payer pour vivre dans un monde civilisé et aujourd’hui nous souffrons que certains y échappent quand d’autre payent plein pot !Oui, « que les gros payent gros et que les petits payent petit », comme le disent si bien les gilets jaunes

Alors, supprimez la taxe carbone sur l’essence et rétablissez l’ISF ! Imposez les multinationales en taxant leurs bénéfices à la source, avant qu’elles n’aillent les planquer dans les paradis fiscaux.

D’ailleurs, attaquez vous à l’évasion fiscale avec une véritable liste noire des paradis fiscaux, une liste crédible; en n’oubliant pas d’y mettre ces pays européens qui trafiquent et volent notre argent ! Vous parlez de la dette, du déficit de la France qui pèse sur nos enfants mais il manque 80 à 100 milliards d’euros à la France, tous les ans, à cause de l’évasion fiscale: avec cette somme, notre budget serait positif ! Oui les richesses existent et c’est possible d’augmenter les salaires tout de suite. Et quand on augmente les salaires de 1%, ce sont deux milliards qui rentrent pour financer la Sécurité sociale, les retraites…

C’est d’ailleurs comme cela que nous pourrons satisfaire une autre urgence: fixer à 1 200 euros le seuil des pensions de nos retraités. C’est le minimum pour vivre décemment et c’est aussi le minimum que l’on doit à tous ceux qui ont travaillé, souvent  durement, pendant plus de quarante ans. Nous demandons aussi l’annulation de la hausse de la CSG pour les retraités et la revalorisation des prestations sociales.

Monsieur le Premier ministre, les Français ont besoin de solidarité mais surtout pas du chantage que vous proposez:

Pour financer votre moratoire sur la hausse des taxes sur les carburants, vous annoncez une baisse de la dépense publique. Ca veut dire quoi ? Encore moins de services publics ? Mais c’est totalement inacceptable !

Les Français vous réclament au contraire davantage de services publics ! C’est bien pour cela qu’il faut un impôt juste, payé par tous, y compris le capital, pour financer les hôpitaux, les crèches, les écoles, les routes… Mettez en place un moratoire sur toutes les fermetures de services publics de proximité, ces maternités, ces trésoreries, ces commissariats, ces bureaux de Poste, ces tribunaux d’instance que vous rayez de la carte.

Enfin, pour relever le défi écologique il y a beaucoup de propositions sur la table, que nous partageons, à commencer par verser la totalité des taxes sur les carburants vers la transition écologique. Nous voulons aussi donner aux collectivités les moyens de développer des transports en commun moins chers, voire gratuits, partout où c’est possible… Comme à Dunkerque.

Il faut engager de toute urgence la rénovation des « passoires thermiques », au rythme de 500 000 logements par an et renforcer le crédit d’impôt pour la transition écologique. Nous vous avons fait de nombreuses propositions, telles que taxer le kérosène des avions ou encore le fuel des porte- conteneurs. Nous vous avons proposé d’imposer de manière exceptionnelle les bénéfices des multinationales, notamment les compagnies pétrolières.

Monsieur le Premier ministre, depuis un an et demi, nous n’avons eu de cesse, avec d’autres, que de vous alerter sur l’injustice flagrante de votre politique, sur la brutalité de certaines mesures, comme la suppression de l’ISF et la hausse de la CSG. Les richesses de ce pays appartiennent à tous les Français, pas à une minorité de privilégiés. Enfin, la crise est aussi d’ordre institutionnel. Elle révèle les maux profonds d’un régime à bout de souffle, quasi monarchique. Cette dérive hyper présidentialiste nourrit la défiance citoyenne à l’égard d’un pouvoir marqué par un double déficit d’efficacité et de représentativité. Le Président de la République n’entend pas le peuple, parce qu’il est déconnecté du peuple !

Vous ne pouvez pas dire que le cap est le bon car c’est vous qui avez déclenché la colère. Plusieurs morts. Des blessés graves. Oui, les violences sont inacceptables. Mais vous ne pouvez pas appeler à la responsabilité et en même temps poursuivre votre politique ! Et pour notre part, nous resterons ici les relais des revendications des gilets jaunes comme des organisations syndicales et des étudiants qui vous demandent de changer de cap.

Et c’est dans cet esprit, nous déposerons une motion de censure visant à engager votre responsabilité.